Frédéric Boyer, une vie d’interprétation 1/2, Traduire Les Évangiles
Dans ce second volet de notre entretien, Frédéric Boyer aborde des questions essentielles que nous posent ces quatre textes majeurs à partir desquels s’est fondé le christianisme. Pourquoi traduire et traduire encore, est souvent une question que l’on se pose, quels que soient les textes. Les éléments de réponse qui émergent ici ont de quoi nous conforter.
Nous comprenons en effet, ici, d’une part que cela permet de rendre vivant un texte, et d’autre part que retourner à la source même transforme et de revivifier les enjeux portés par ce texte.
Frédéric Boyer nous donne à comprendre la nécessité vitale de son travail qui traverse quelques uns des questions qui ne cessent d’agiter les hommes. La première est celle de la mort à laquelle, ce qui deviendra le christianisme apporte une « réponse » tout à fait neuve, aussi bien vis-à-vis du judaïsme que des croyances en vigueur dans la société romaine.
De la notion d’extase terme utilisé pour rendre compte de la stupeur des femmes devant le tombeau vide, à celle d’absence, terme qui est au cœur du message de Jésus lui-même qui annonce qu’il faudra bientôt faire sans lui, à celle de résurrection, Frédéric Boyer montre comment il a pensé son travaille et comment la traduction joue sur notre approche de ces moments et de ces notions.
La question de l’interprétation et de la vie comme travail à la fois d’introspection, de constitution d’une intériorité, de travail sur la mémoire et finalement de « gestion » de l’attente, voilà ce que nous donnent à penser et à vivre ces quatre textes et que la traduction nouvelle permet de beaucoup mieux appréhender et comprendre.
Angoisse, confession, coup de force de Jean qui fait du logos une sorte de double du dieu, tout conduit à montrer que ces quatre textes vont devenir la référence fondamentale à partir laquelle la question de l’éthique va pour les siècles suivant se déployer. Dans ce cadre, l’un des apports de cette traduction est de « déculpabiliser » ce que la religion chrétienne aura fini par imposer à travers la notion de péché et de montrer que dans ces textes qui sont les seuls à rapporte ce qu’a pu être la vie de ce rabbi Jésus, ce dernier ne cherchait en rien à culpabiliser ceux qu’il aidait, mais au contraire à leur faire appréhender en eux l’existence d’un « manque » qui est à la fois la source de leurs tourments et la porte ouverte sur leur salut.