« L’œil est le plus grand des artistes. Par l’action conjuguée de sa structure et des lois et de la lumière se produit la perspective, qui intègre chaque masse d’objets, de quelque caractère que ce soit, en une sphère colorée et nuancée, si bien que là où les objets particuliers sont pauvres et indifférents, le paysage qu’ils composent est rond et symétrique. Et de même que l’œil est le meilleurs des agenceurs, la lumière est le premier des peintres. Il n’existe pas d’objet si répugnant qu’une lumière intense ne puisse rendre beau. L’excitation qu’elle provoque sur le sens de la vue et une sorte d’infinité qui est en elle, comme l’espace et le temps, rend gaie toute manière. Même un cadavre possède sa propre beauté.. Mais à côté de cette grâce générale répandue sur toute la nature, presque toutes les formes individuelles sont agréables à l’œil, comme le montrent nos imitations de quelques-unes d’entre elles : le gland, la vigne, la pomme de pin, l’épi de blé, l’œuf, les ailes et la forme de nombre d’oiseaux, la griffe du lion, le serpent, le papillon, les coquillages, la flamme, les nuages, les bourgeons, les feuilles et les formes de beaucoup d’arbres, tel que le palmier par exemple. »
La nature, 1836, Ralph Waldo Emmerson