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Regard sur l’image

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- De l’invention de la figuration II

,  par Hervé BERNARD dit RVB

Première Partiie

« Tout le peuple se révolta quand il entendit dire que la reine était une hérétique. Mais le roi l’aimait tant qu’il fit taire tous ses ennemis. Khosrow Parvitz n’était pas seulement un souverain puissant, c’était aussi un homme sage qui savait que la beauté terrestre est éphémère. Et pour conserver à tout jamais le doux visage et le corps magnifique de son épouse. Il fit appel au sculpteur le plus renommé de son temps, Farbad pour qu’il la sculpta dans le marbre. Le jeune artiste, qui jour après jour regardait la silhouette sublime de la reine tomba amoureux d’elle. Partout où il était, quoi qu’il fasse, le jour ou dans son sommeil, partout, son ravissant visage l’accompagnait.

Jardin des Tuileries © Hervé Bernard 2014

Finalement, il ne réussit plus à cacher sa passion. La statue et la reine vivante se ressemblaient de plus en plus. L’œuvre de Farhad, ses regards, le son de sa voix, tout trahissait la tempête de son cœur. Un jour, le roi le remarqua. fou de jalousie, il tira son épée, et Shirin eut juste le temps de se placer devant le sculpteur et de le protéger de son corps. En remerciement pour son œuvre d’art, Khosrow Parvitz lui laissa la vie, mais l’exila à jamais dans les montagnes reculées du Bisotum. Farhad y devint fou de langueur et d’amour désespéré. En proie à une douleur farouche, il saisit un marteau et un ciseau et se mit à tailler dans la crête pierreuse de la montagne une immense statue de Shirin. De nos jours encore, on peut voir cette représentation de la divine reine sortant de son bain. Devant elle se tient l’étalon du roi, Chebdiz dans toute l’ardeur de sa jeunesse.

Casandre
Image extraite du film Empreintes © Hervé Bernard 2014

Le roi envoya alors dans les montagnes de Bisotum un messager chargé d’annoncer la nouvelle, fausse, de la mort de la reine Shirin. Fahrad ne voulut pas lui survivre. Pour calmer son insupportable douleur, il se jeta sur sa hache qui lui fendit la poitrine en deux. en tombant,la lame s’enfonça dans le sol et le manche de la cognée, imprégné du sang du sculpteur verdit, s’épanouit et produisit un fruit. Ce fruit est la grenade qui, en souvenir de la mort de Fahrad, est fendue et quand on l’ouvre. C’est pourquoi de nos jours encore on l’appelle la pomme de Farhad. »

Alamut
de Vladimir Bartol