Regard sur l’image

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- Aux origines de la couleur : l’opacité

,  par Hervé BERNARD dit RVB

Dès que l’on parle de couleur surgit une dichotomie, dichotomie entre la couleur matière et la couleur lumière. Manière de poser la question de la couleur qui la rend insoluble. Peut-être faut-il adopter un autre point de vue ?

Depuis Newton, on considère que la couleur est issue de la lumière, c’est la couleur du prisme. En fait, on estime pratiquement que poser une couleur sur une surface blanche cela revient à produire de la couleur à partir du blanc. La couleur apparaîtrait par via di porre, autrement dit, la couleur serait un ajout au blanc. Mais ajouter au blanc ne fait qu’augmenter sa luminosité et nous savons tous pour avoir été ébloui que si l’on augmente l’intensité d’un rayonnement qui nous éblouit, l’éblouissement s’intensifie et l’on obtient rien d’autre. Autrement dit, un canal d’information saturé continue à saturer si l’on augmente la quantité d’information. Les capteurs numériques et la pellicule photographique sont là pour nous le rappeler au cas où nous douterions de nos perceptions. Quant à la diminution de l’intensité d’un blanc, elle ne génère que du gris. Là aussi les capteurs et la pellicule sont là pour le confirmer.

A contrario, augmentez l’intensité d’un noir, il produira une couleur. Comment ? Les seuls noirs purs que nous connaissons sont des noirs industriels. Dans la vie, le noir est rarement noir, il est bien souvent marron foncé, bleu nuit, vert caca d’oie... La couleur, quand elle est trop sombre ne perd pas nécessairement sa nuance. Par contre, pour devenir blanche, elle doit perdre toutes nuances. Donc, pour poursuivre notre raisonnement, regardons l’apparition de la couleur comme issue du processus inverse : par via di levare, c’est-à-dire par soustraction, soustraction du noir un peu comme en imprimerie quand on réduit la quantité d’encre utilisée. [Cette soustraction là est un processus différent de la couleur soustractive.]

Donc, partons de l’hypothèse que la couleur provient de l’obscurité, la couleur réfléchie est alors une transparence de la matière à cette longueur d’onde et la couleur absorbée une opacité. L’opaque, par définition absorbe toutes les longueurs d’onde, tandis que le transparent laisse passer toutes les longueurs d’onde. En fait, il faudrait parler de transparence et d’opacité réflective. Absorber une longueur d’onde, c’est assombrir une lumière dans cette longueur d’onde et réfléchir une autre longueur d’onde, c’est bien être transparent à cette longueur d’onde si l’on reprend la définition de la transparence et celle de l’opacité citées auparavant.

Comme l’aquarelle et le glacis nous le montrent, cette transparence à la couleur est extrêmement variable. Cette couleur fabriquée par transparence et opacité réflective est une couleur produite par la matière et non par la lumière. Ce processus nous rappelle que la couleur, dans la nature, est la plupart du temps issue de la matière et non du prisme à quelques exceptions près : les sources lumineuses. La réflexion sur l’eau, sur une vitre, sur une tâche d’huile... étant un type particulier de source lumineuse.


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Sur ce thème, voir aussi l’article « Refonder la couleur », François Perrodin, dans Pratiques, réflexions sur l’art n°15