« Je connais la force considérable de la peinture qui, ainsi que vous l’avez donné à voir, se retrouve dans toutes les activités des anciens et même dans l’écriture et la composition. Et peut-être qu’avec votre imagination fertile, contrairement à moi, vous n’avez pas été frappé par la grande affinité des lettres avec la peinture, mais bien plutôt par celle de la peinture avec les lettres. Ni par le fait que ces deux sciences sont sœurs si légitimes que si l’on éloigne l’une de l’autre, aucune n’est parfaite. Encore que l’on pourrait croire que l’époque actuelle [la Renaissance] s’ingénue à les tenir en quelque sorte séparées. Or, si l’on ouvre les livres anciens, il en est peu, parmi les plus célèbres, qui ne ressemblent à des peintures et à des retables. Et si certains sont pesants et confus, c’est assurément parce que leur auteur était un piètre dessinateur, peu entendu à concevoir une œuvre et à la faire partager. Il est inoubliable que les ouvrages les plus intelligibles et les plus denses proviennent des meilleurs dessinateurs. Et même Quintilien, dans la perfection de sa rhétorique, ordonne à son orateur non seulement de dessiner en paroles, mais aussi de savoir tracer et coucher sur le papier un peu de sa propre main. »
Extrait des « Dialogues de Rome »,
Messer Lattanzio Tolomei s’adresse à Michel Ange