Cette exposition de la galerie Agape Hub 50 rue Meslay Paris dresse un horizon né de superpositions de couleurs chatoyantes et de formes sans frontières. Nous distinguons une réalité tronquée par une certaine abstraction, étrange, diffuse. Cette réalité communique sur les aires ou les profondeurs marines. Parfois les oeuvres traitent de la surface qui fait reflet, qui fait écho, qui fait lien entre ces deux univers, atmosphérique et aquatique. Les sombres abysses entrent en dialogue avec les espaces terrestres ouverts.
Une lumière sans toutefois être vraiment phosphorescentes unis les oeuvres de ces deux artistes qui semblent, comme certains corps, avoir presque la propriété d’émettre plus de lumière qu’ils en ont reçu. Le mot grec "phosphoros" signifie "porte-lumière" dans le sens de porteur. Ces oeuvres véhiculent une lumière qui émane de leur singularité dans les couleurs et de la justesse dans leur composition.
Le regard à une place prépondérante dans le travail ces deux artistes. Yuriko necherche pas à exprimer l’essence du paysage mais “à le voir”. En le peignant, elle luidonne une identité, une forme. Elle révèle plus qu’elle ne reproduit le paysage et ce,de manière frontale, avec des signes francs, au traitement vif et direct. La dentelledes coraux offrent des détails qui sont tout à fait effacés dans les paysages de Yuriko.C’est à notre imagination d’habiter ses environnements avec des éléments figuratifsqui sont seulement suggérés dans sa peinture.
Hervé Bernard lui ne reproduit pas le réel non plus mais révèle des points de vue sur celui-ci. Il le veut impactant dans la perception que nous avons du monde. Avec ces images, il parle de “l’œil qui voit l’image et du cerveau culturel qui l’interprète”.
La suspension des oeuvres photographiques, juste devant le mur, fait flotter l’image qui en devient onirique et substantielle. Elle n’est pas tout à fait ancrée dans la réalité, mais plutôt en train d’épouser l’air, de trouver sa place dans un espace lui-même en lévitation. La superposition et la transparence qu’il intègre dans son travail, évoque les profondeurs vertigineuses des abysses.
Eva Khatchadourian
Hervé Bernard
Créer et interroger l’image.
Artiste visuel, il photographie, filme et sculpte. Ces techniques sont au service d’un propos qui aboutira à un film, un livre, une exposition ou une installation...
L’anthropocène, avec une attention particulière à l’eau et au paysage, est au cœur de ses réalisations visuelles. Le vivre ensemble étant un autre point de vue sur cette thématique.
Ses images présentées à la galerie Agapé HUB sont un prolongement de son ouvrage Regard sur l’image, un essai sur la compréhension de l’image à travers la perception visuelle, la perception culturelle et la technique de l’image.
Elles sont extraites d’une mise en image de La Spirale une nouvelle d’Italo Calvino qu’il a illustré. Celle-ci sera aussi présentée et mise en vente sous forme d’un livre(éditions regards & impressions) lors de l’exposition. Extrait d’un texte de Jean-Louis Poitevin.
« Notes sur La Spirale
1 - Une conscience transhistorique
Cette nouvelle d’Italo Calvino nous présente l’histoire du vivant sur cinquante millions d’années, c’est-à-dire notre histoire. Le narrateur, un être vivant, apparaît à certains moments du texte comme un démiurge qui aurait tout inventé, tout créé et qui serait doté à la fois d’une mémoire absolue et d’une perception totale tel un dieu un et multiple à la fois. En fait, il est plutôt l’incarnation singulière d’une conscience en train de se former et qui se remémorerait à partir de son présent actuel l’histoire globale de sa formation. Cette conscience est à la fois individuelle et commune à tous. Elle existe à partir d’un « lieu » englobant tous les lieux possibles, c’est-à-dire d’un corps.
Ce personnage du nom énigmatique de Qfwfq est comme souvent chez Calvino un personnage dont on pourrait dire qu’il est né du texte, des mots, des lettres même et qu’il vit comme texte dans le texte. Mais il est surtout une sorte de métaphore de l’histoire du vivant et de la pensée. »
- La Spirale, Italo Calvino, Extraits de cet ouvrage
- Francis Bacon, logique de la sensation - Sensations : qualité ou quantité ?