« L’une des traces d’images figuratives liées aux textes religieux du monde judaïque date de 1278. Il s’agit d’un recueil de lectures bibliques, de prières et d’autres textes. Outre sa datation très tardive, cet ouvrage a un autre intérêt. Il contient une miniature qui représente Moïse priant, lors de la bataille contre les Amalécites, les bras soutenus par Aaron et Hour, afin d’orienter favorablement le sort de la bataille. Particularité de cette miniature, les bras ne sont pas dressés vers le ciel, comme dans les représentations de cette scène et comme le texte nous incite à le penser, mais pliés et à hauteur de poitrine et resserrés sur le corps. » Regard sur l’image p 234
On sait qu’à la même époque, c’est-à-dire sous le règne de Saint-Louis, l’Église, sous l’égide du Pape, persécute les juifs et que Saint Louis suit le mouvement avec plus ou moins d’enthousiasme. Ainsi, il aurait fait une distinction entre le judaïsme et l’hérésie, écartelé entre le fait que le peuple juif est celui qui a tué le Christ et le fait qu’il doit les protéger parce qu’ils sont une minorité. Ainsi, selon Jacques Le Goff, il aurait longtemps refusé d’appliquer les mesures antijuiives préconisées par le Pape.
Parallèlement, un mouvement de “ récupération ” de l’Ancien Testament, tente de transformer, en se basant sur des analogies visuelles, les scènes clés de cet ouvrage en des scènes annonciatrices des principales étapes de la vie du Christ.
Ainsi, « selon Meyer Shapiro, cette position est adoptée dans cette illustration afin d’éviter toute analogie avec la croix. On pourrait dire toute “récupération” par les chrétiens afin d’en faire une image annonciatrice et, par la même occasion, faire de Moïse un annonciateur du Christ – Moïse les bras écartés tendus vers le ciel ressemblerait à un Christ en croix sans sa croix.
Au-delà de ce conflit, cette image est la concrétisation de la puissance de l’étymologie du mot illustration, car il s’agit bien d’une mise en lumière du texte original. Par ce refus de l’analogie gestuelle à la crucifixion, cette image est un hors-texte tout aussi important que le texte. En effet, affirmer au Moyen Âge que Moïse n’est pas l’annonciateur du Christ, c’est s’opposer à une Église dangereuse par son omnipotence. » Regard sur l’image p 234
L’analogie entre la manne qui tombe du ciel dans l’Ancien Testament avec l’Eucharistie est un autre exemple de cette récupération de l’Ancien Testament par les Chrétiens. Cette récupération aurait été initié par Philon d’Alexandrie (Alexandrie, vers -20 – vers 45).
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– Regard sur l’image
Un ouvrage sur les liens entre l’image et le réel.
350 pages, 150 illustrations, impression couleur, Format : 21 x 28 cm
,France Métropolitaine : prix net 47,50 € TTC frais d’expédition inclus,
Tarif pour la CEE et la Suisse 52,00 €,
EAN 13 ou ISBN 9 78953 66590 12
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